20/07/2025 - Général
Guerre des taux : Trump, Powell et l’avenir des marchés en suspens
Un monde désynchronisé, des marchés en mutation
Aujourd’hui, impossible de parler des marchés sans s’arrêter sur la tension qui règne autour de la Fed, de Trump, et de cette fameuse question : “Va-t-on enfin avoir des baisses de taux ?” Le climat post-Covid a totalement rebattu les cartes : la croissance n’évolue plus au même rythme d’un continent à l’autre, l’Europe a pris un coup d’avance sur les marchés actions, et, pendant ce temps-là, la Fed avance à pas mesurés, scrutée par tout l’écosystème financier… et surveillée de près par Trump, qui ne manque jamais une occasion de mettre la pression.
Ce qui me frappe d’abord, c’est cette désynchronisation mondiale. Les investisseurs ne perçoivent plus l’Europe comme l’éternel retardataire : les actions européennes ont surperformé depuis le début de l’année, alors même que la croissance US, pourtant souvent considérée comme le moteur du monde, est en train de caler. Les prévisions pour les États-Unis sont retombées à 1,3 % de croissance cette année, du jamais-vu depuis longtemps.
La Fed, piégée par l’inflation
Face à ce contexte, la Fed est plus que jamais sous les projecteurs. Après avoir baissé ses taux de 100 points de base en 2023, elle fait aujourd’hui une pause, et personne n’est vraiment certain de la suite. Les marchés espèrent une baisse en septembre, mais tant que l’inflation core reste autour de 3 % (un niveau qu’on n’avait pas vu depuis la fin des années 90, hors période Covid), c’est niet. On oublie trop souvent à quel point une inflation de 3 % peut être destructrice pour la classe moyenne américaine : pour ceux qui n’ont ni immobilier, ni patrimoine financier, chaque hausse de prix se ressent immédiatement dans le quotidien. La Fed n’a pas le luxe de gérer ça à la légère.
Pression politique et bras de fer
La pression politique, elle, est omniprésente. Trump joue la carte de l’urgence : il veut des taux bas, vite, et il n’hésite pas à personnaliser le débat, à menacer Powell de le virer, à multiplier les effets d’annonce. On est dans un bras de fer typiquement américain, où la politique se mêle à l’économique, sans filtre. Mais le sujet est bien plus complexe que ça. La Fed, ce n’est pas qu’un seul homme, c’est un board aux sensibilités multiples, obligé de prendre en compte tous les États-Unis, du plus riche au plus pauvre. Il y a déjà eu des erreurs, comme cette sous-estimation de l’inflation post-Covid : la Fed ne veut pas reproduire les mêmes fautes en relâchant trop tôt sa politique.
Quand les taux élevés mordent l’économie réelle
Sur le terrain, les taux élevés font mal. Le marché immobilier US est grippé, les crédits coûtent cher, le refinancement hypothécaire atteint des niveaux dignes de la crise des subprimes. Les Américains ressentent directement cette politique monétaire dans leur capacité à emprunter, à consommer, à investir. Ce n’est pas juste un débat de salon entre économistes.
Des marchés actions qui s’en fichent ?
Et pourtant, les marchés actions ne semblent pas s’en soucier. Ils restent perchés sur des sommets de valorisation, alors même que les obligations et le cash offrent désormais des alternatives bien rémunérées. On assiste à un décalage flagrant : la complaisance des actions contraste avec la vigilance du marché obligataire. Si jamais l’inflation devait repartir, ou si la Fed ne bougeait pas en septembre comme beaucoup l’espèrent, la correction pourrait être brutale.
Guerre commerciale : le dernier verrou
Dernier facteur clé : la guerre commerciale. Trump fait traîner les accords, multiplie les menaces de droits de douane, et repousse la visibilité dont la Fed a besoin pour agir. En réalité, plus vite on aura des deals commerciaux solides, plus vite la Fed pourra se permettre de baisser ses taux en toute confiance.
Ce qu’il faut surveiller pour la suite
Les prochains mois seront déterminants. On va scruter chaque statistique : inflation, emploi, mais aussi publications de résultats d’entreprises et leur “guidance”. Tout est lié : si l’environnement commercial se stabilise et que les chiffres s’alignent, on pourra enfin envisager un vrai assouplissement monétaire à l’automne. Sinon, la patience restera de mise, et les marchés pourraient devoir s’ajuster à une réalité bien moins “douce” que ce qu’ils imaginent aujourd’hui.
En bref : La Fed est piégée entre prudence et pressions politiques, l’économie américaine ralentit, les marchés actions paraissent déconnectés du risque réel… et tout se jouera sur les données macro et la politique internationale cet été. Préparez-vous à rester agiles et à ne pas prendre pour acquis ce qui vous semble “évident” aujourd’hui. Les marchés n’aiment ni l’incertitude, ni les surprises : la suite pourrait bien leur en réserver quelques-unes.
L'équipe IVT
18 Juillet 2025